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  • 1973 : Robert Wagoner publie les résultats les plus précis alors sur la production d'hélium et de lithium par nucléosynthèse primordiale.

Réintroduction de la nucléosynthèse primordiale

Momentanément oubliée après le succès de la nucléosynthèse stellaire, la nucléosynthèse primordiale, c'est-à-dire la formation de noyaux ayant eu lieu durant le Big-Bang, a connu un grand regain d'intérêt après la découverte du fond diffus cosmologique. Non seulement celui-ci confirme que l'Univers était beaucoup plus chaud dans le passé, et probablement suffisamment pour que des réactions nucléaires aient eu lieu à grande échelle, mais en plus la mesure de sa température est une contrainte expérimentale supplémentaire utile pour mieux tester ces modèles.

Au début des années 1960, les travaux d'Alpher, Follin et Hermann, ainsi que ceux d'Hayashi, ont permis d'obtenir une bonne description de la physique de l'Univers pour une température de l'ordre de la centaine de MeV - au-delà, la physique des particules n'est alors pas encore assez bien connue pour obtenir une meilleure description. A ces températures, l'Univers était constitué de protons et de neutrons (les baryons), d'électrons, de photons, et de neutrinos et antineutrinos. Les réactions entre ces différents constituants étaient suffisantes pour les maintenant en équilibre thermodynamique, et donc une compréhension des phénomènes physiques antérieurs à $\sim$ 100 MeV n'est pas nécessaire. L'Univers est alors décrit par un nombre limité de paramètres, les "conditions initiales", comme le ratio baryons/photons ($=(n_p + n_n)/n_{\gamma}$).

Avec le refroidissement de l'Univers, certaines réactions maintenant l'équilibre thermique sont interrompues. Le ratio protons/neutrons est ainsi constant, et n'évolue plus que par la désintégration spontanée des neutrons d'un temps de demi-vie de l'ordre de la dizaine de minutes. Une fois la température abaissée au dixième de MeV, les réactions nucléaires deviennent prédominantes, c'est le début à proprement parler de la nucléosynthèse primordiale. Afin d'estimer les abondances d'éléments résultantes, il faut alors intégrer toutes les réactions nucléaires et leur sections-efficaces aux calculs. C'est ce travail qui a été repoussé pendant plusieurs années après les derniers apports de Fermi et Turkevich.

Après la découverte du fond diffus cosmologique, la donne change donc très vite. Le Big-Bang parait beaucoup plus vraisemblable et dont la nucléosynthèse primordiale aussi. Par ailleurs, l'abondance des éléments ${}^2_1\textrm{H}$ ${}^3_2\textrm{He}$, ${}^4_2\textrm{He}$ et ${}^{7}\textrm{Li}$, n'a pas encore d'explication satisfaisante, ce qui constitue une autre raison d'envisager des modes de production des éléments autre que la nucléosynthèse stellaire. En 1964, Hoyle et Tayler publient un article intitulé "The mystery of helium abundance" (F. HOYLE, R. J. TAYLER  1964) , dans lequel ils évaluent la vraisemblance d'une explication de l'abondance observée de l'hélium par une synthèse durant un Big-Bang chaud, donc via le mécanisme qu'Alpher et Hermann ont été les premiers à proposer. Ils soulignent, en plus de sa valeur trop élevée ($\textrm{He}/\textrm{H}\sim 0,01$) pour les mécanismes stellaires classiques de formation, l'homogénéité de l'abondance observée de l'hélium. Le fait que celle-ci dépende très peu de l'objet observé, et donc qu'elle soit similaire proche ou loin des sites de production stellaires, et insensible à leur âge, semble indiquer une origine différente. L'abondance observée est très grossièrement en accord avec une production d'origine cosmologique selon leurs calculs, qui prédisent $\textrm{He}/\textrm{H} \sim 0,14$ au minimum (une légère tension avec la valeur expérimentale un peu trop faible est tout de même observée). Ils concluent alors que l'hélium a du être produit à très haute température, comme cela est possible dans le cadre du Big-Bang chaud, ou bien dans des étoiles supermassives. D'autres études similaires sont menées en accord avec ce résultat. En 1967, Robert Wagoner, qui travaille à Caltech auprès de Fowler et Hoyle (B. Bertotti  1990) , publie les résultats d'une simulation impliquant 41 noyaux et 79 réactions faibles et nucléaires (Robert V. Wagoner, William A. Fowler et al.  1967) . Les sections efficaces de toutes ces réactions n'étant pas aisées à déterminer, certaines sont estimées à partir d'autres données (comme les énergies de liaison).

Réseau de réactions nucléaires employé par Wagoner
Réseau de réactions nucléaires employé par Wagoner
Réseau de réactions nucléaires employé par Wagoner. A gauche, l'ensemble des réactions (pour les élements $A\leq 23$) est représenté. A droite, seules les réactions entre éléments légers sont présentées, de façon détaillée.
Les résultats indiquent un bon accord avec les observations d'abondance des éléments légers de l'époque pour une densité baryonique $\rho_b \simeq 2 \times 10^{-28} \textrm{kg}.\textrm{m}^{-3}$, ce qui est raisonnablement proche de la densité critique connue à l'époque ($\rho_c \simeq 10^{-26}\textrm{kg}.\textrm{m}^{-3}$).
Résultats des calculs d'abondance des éléments de Wagoner en fonction de la densité baryonique actuelle
Résultats des calculs d'abondance des éléments de Wagoner en fonction de la densité baryonique actuelle
Le graphe représente l'abondance des éléments (en terme de fraction massique) en fonction de $\rho_b/\theta$ où $\theta = T_0/(\textrm{3 K}$ où $T_0$ est la température du fond diffus cosmologique (donc assez proche de 3 K).
Fort de meilleures données nucléaires, Wagoner publie des résultats améliorés en 1973 (Robert V. Wagoner  1973) . Wagoner débute cet article en donnant 3 arguments en faveur de la nucléosynthèse primordiale :
  • La découverte de galaxies naines bleues jeunes (Bodo Baschek, Wallace L. W. Sargent et al.  1972) et pauvres en $\textrm{O}$ et $\textrm{Ne}$ mais avec une abondance en hélium similaire aux valeurs pour des objets plus anciens.
  • Aucun processus astrophysique ne semble capable de produire autant d'hélium et de lithium qu'observé.
  • L'isotropie constatée du fond de rayonnement désormais mesuré à 2,7$\pm$0,1 K et la nature de corps noir de son spectre sont des arguments très forts en faveur d'une interprétation comsologique.
Le tableau suivant résume la situation expérimentale en 1973 :
Abondance d'éléments légers
Abondance d'éléments légers
Données sur les abondances d'éléments dont la synthèse n'est pas bien expliquée par la nucléosynthèse stellaire seule. (Robert V. Wagoner  1973) .
Wagoner trouve par ailleurs les résultats suivants :
Prédictions d'abondance par Wagoner
Prédictions d'abondance par Wagoner
Prédictions d'abondance (Robert V. Wagoner  1973) .
L'accord avec les valeurs expérimentales est correct et permet de placer une limite supérieure sur la densité baryonique $\rho_b$. Celle-ci doit alors être inférieure à $\rho_b \simeq 7 \times 10^{-27} \textrm{kg}.\textrm{m}^{-3}$, insuffisant pour que $\rho_b = \rho_c$ (densité critique égale à la densité baryonique). Ainsi, d'après ces résultats, l'Univers ne peut-être plat s'il est constitué de matière baryonique seule.

Références

En savoir plus

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    Constante de Hubble

    La constante de Hubble est la constante de proportionnalité $H_0$ qui lie le décalage spectral $z=\lambda_{rec}/\lambda_{em}$ d'un objet céleste vu par un observateur à la distance entre les deux, dans la limite où cette distance est petite. Historiquement, la fuite des galaxies était interprétée en terme d'effet Doppler à faible vitesse pour lequel $z \simeq v/c$. On écrivait donc $v = z c = H_0 d$. Sa première estimation "précise" est due à Hubble en 1929 et était d'environ 500 km/s/Mpc, mais la méthode qui conduisit à cette valeur comportait une erreur. Aujourd'hui on l'évalue à 70 km/s/Mpc.

    Démonstration de la relation entre taux d'expansion et distance et de la loi de Hubble

    Afficher/Masquer
    Un objet émet un signal lumineux dès l'instant $t_e$ et celui-ci est reçu par l'observateur à l'instant postérieur $t_r$. Le signal ayant une certaine période $T_e$, un second "bip" est émis à un instant $t_e+T_e$ et est reçu par l'observateur à un instant $t_r+T_r$. On suppose l'observateur ainsi que la source immobiles dans l'espace en expansion (càd "comobiles"). Les deux signaux parcourent donc la même distance comobile $\chi$ : \begin{equation} \chi = \displaystyle\int_{t_e}^{t_r} \dfrac{cdt'}{a(t')} = \displaystyle\int_{t_e+T}^{t_r+T'} \dfrac{cdt'}{a(t')} \mbox{ (1)} \end{equation} L'intégrale de droite peut être décomposée en trois si bien que : \begin{equation} \displaystyle\int_{t_e}^{t_r} \dfrac{cdt'}{a(t')} = \displaystyle\int_{t_e+T_e}^{t_e} \dfrac{cdt'}{a(t')} + \displaystyle\int_{t_e}^{t_r} \dfrac{cdt'}{a(t')} + \displaystyle\int_{t_r}^{t_r+T_r} \dfrac{cdt'}{a(t')} \end{equation} Donc \begin{equation} \displaystyle\int_{t_e}^{t_e+T_e} \dfrac{cdt'}{a(t')} = \displaystyle\int_{t_r}^{t_r+T_r} \dfrac{cdt'}{a(t')} \end{equation} La période $T$ a vocation à être très petite devant le temps de variation de $a$ (l'expansion de l'Univers pendant un cycle de lumière - $10^{14}$ Hz dans le visible - est négligeable). Ainsi l'expression ci-dessus devient : \begin{equation} \dfrac{T_r}{T_e} = \dfrac{a(t_r)}{a(t_e)} \end{equation} Soit en terme de l'ongueur d'onde et de redshift $z$ : \begin{equation} 1+z \equiv \dfrac{\lambda_r}{\lambda_e} = \dfrac{a(t_r)}{a(t_e)} \end{equation} On constate qu'un Univers en expansion se traduit bien par un allongement des longueurs d'ondes. Pour de faibles distances, $t_r - t_e \simeq d/c$, et donc $a(t_e) \simeq a(t_r) - d \dot{a}(t_r)/c$. Par ailleurs si $t_r$ correspond au temps présent, alors $a(t_r) = 1$ et $\dot{a}(t_r) = H_0$ donc : \begin{equation} z = \dfrac{\lambda_r-\lambda_e}{\lambda_e} \simeq H_0 d / c \end{equation}

    Mesures de la constante de Hubble

    Avant les années 1990, la valeur de la constante de Hubble était très mal connue. De cette époque on a maintenu l'habitude d'employer par commodité le paramètre sans dimension $h = \dfrac{H_0}{\textrm{100 km/s/Mpc}}$ qu'on s'attendait valoir entre 0.5 et 1. Aujourd'hui, les mesures employent des méthodes assez diverses (plus uniquement l'utilisation de céphéïdes comme chandelles standard), et les valeurs sont en assez bon accord, malgré une petite tension :

    Je me souviens d'un post très drôle de LPFR sur Futura-Sciences qui disait en substance, en réponse à une personne qui demandait si la constante de Hubble était variable (cette personne confondait bien-sûr le paramètre de Hubble $H(t)$ et la constante de Hubble qui est sa valeur au temps présent donc bien une constante) :

    La constante de Hubble a beaucoup plus changé au cours des décennies qui ont suivi sa découverte que depuis le Big-Bang.
    LPFR, 2012
    C'est assez drôle mais assez vrai. La première valeur de Hubble était près de dix fois trop grande, et après les travaux de Sandage (qui restreignait $H_0$ à l'intervalle 50-100 km/s/Mpc), il fallut encore plusieurs décennies pour décider à quelques pourcents près.

    Références